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FEMINISMES


Nous vivons dans une société où le respect de la loi du patriarcat est le passage obligé vers la réussite. Pour accéder à la reconnaissance publique, les femmes doivent acquérir un passeport, ce sont les diplômes supérieurs. Elles aspirent donc à démontrer leurs capacités intellectuelles, et les chercheuses en études féminines abondent en France. Différentes stratégies idéologiques se font concurrence dans la guerre contre le patriarcat. Mais que peut faire pour le féminisme une femme qui souhaite d’abord la reconnaissance des hommes ? Nul ne peut rien obtenir quand il a deux rêves contradictoires.

La raison et le cœur peuvent cohabiter en une seule personne. Cependant, un diplôme ne mesurant que l’aptitude à raisonner, il est un laisser-passer pour toutes les expressions totalitaires. L’art de manipuler la langue avec élégance peut dissimuler un cœur glacial. La raison seule n’offre aucune garantie d’humanité et s’enorgueillir d’un doctorat, c’est encore servir la domination patriarcale. Car un doctorat n’est pas uniquement une preuve d’aptitude à la réflexion. C’est en même temps un gage de renoncement à la rébellion contre la domination masculine.

Récemment, au cours d’un séminaire féministe, une jeune chercheuse exprimait sa fierté d’appartenir à l’intelligentsia féminine : une chercheuse raisonne, ne fait rien sans justification rationnelle, donc elle sait où elle va ; tandis qu’une militante féministe est sujette à la subjectivité, victime de ses émotions, donc source potentielle de désordres.

En somme, comme les hommes nous l’ont bien appris, la rationalité serait le Bien, mais la rationalité rend-elle heureux ? Quand une femme malheureuse en amour recherche un nouveau partenaire, elle dit souvent ceci : «Il pourra être pauvre, travailleur manuel, mais il devra d’abord être gentil». Les femmes ne rêvent pas de rationalité, elles revendiquent un adoucissement des mœurs. La rationalité n’est qu’une qualité du cerveau et le cerveau est un organe qui doit servir à améliorer la qualité de vie des femmes et non à réprimer leurs manières à elles d’être femmes.

Les politiciens et les politiciennes font l’Histoire, les historiens et les historiennes témoignent. Les militantes féministes font le féminisme, les historiennes du féminisme rapportent les joies et les peines des militantes. Peut-on être en même temps militante et historienne du féminisme ? Une militante prend parti, une historienne relate. Comment être à la fois devant et derrière la caméra ?

Le moteur du féminisme, c’est le militantisme, car les militantes peuvent conjuguer la tête et le cœur dans l’action. La logistique du féminisme, c’est la recherche. Une universitaire peut être tour à tour auteure militante et chercheuse, à condition qu’elle précise en signant ses écrits sa qualité de militante ou de chercheuse. Utiliser un travail de recherche pour prouver ce dont on avait l’intime conviction au départ, c’est tromper le lecteur et pratiquer l’abus de pouvoir. Oui bien sûr, les femmes sont capables d’abus de pouvoir.

Et, en prendraient-elles à leur aise dans une société d’où toute trace de patriarcat aurait disparu ? Je le crois. Qu’est-ce qui distingue alors une femme de guerre d’une femme de paix ? C’est la prise en compte dans sa démarche de sa capacité de donner la vie. Une femme qui qualifie de détail biologique dû au hasard son aptitude à donner la vie ne peut pas prétendre être capable de faire tourner le monde mieux que les hommes. Par contre, une femme qui s’affirme responsable de la part d’elle-même qui la fait femme et l’assume est un atout pour la paix.

Les hommes créent des systèmes de pensée et regardent ces systèmes comme leurs ‘bébés’. Ils sont toujours prêts à la guerre pour défendre leurs créature, mais dans le milieu de la guerre, quand ils ont oublié ce qui avait motivé le déclenchement des hostilités, alors ils disent «Plus jamais ça !». Ils n’aspirent plus qu’à la paix du foyer.

Aucun système de pensée, politique, philosophique ou religieux n’a apporté la paix. C’est pourquoi on ne devrait remettre le droit de déclarer une guerre qu’à une femme qui a prouvé avec constance son attachement viscéral à la préservation de la vie.



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